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Paru dans les Cahiers Pédagogiques, n° 195, juin 1981

Laminage continu… (1)

ou

de la philosophie en lycée technique,

premières impressions, questions et ébauches…

 

 

Première surprise : la prĂ©sentation mutuelle. Il n’y a sans doute qu’à l’École oĂą il peut apparaĂ®tre bizarre de se prĂ©senter avant de parler (2). Un souvenir : quand j’étais lycĂ©en, il Ă©tait frĂ©quent, surtout si on avait affaire Ă  un nouveau prof, de passer un bon mois au dĂ©but de l’annĂ©e Ă  se demander comment il s’appelait. La rĂ©ciprocitĂ© aussi Ă©tonne : se prĂ©senter les uns aux autres, tenter de dire ce qu’on fait lĂ . " Qu’est-ce que je fous, lĂ  ? " Question philosophique. Bien peu s’y risquent (3).

Trois heures donc, par classe : deux terminales E (pas d’épreuve Ă©crite au bac )(4) et quatre classes de TS (" techniciens supĂ©rieurs " – Ă  quoi ?) qui prĂ©parent en deux ans un BTS (Brevet de…) et pour lesquelles il y a une Ă©preuve Ă©crite de français. Le contexte : Ă©tablissement de mille Ă©lèves (5), dont quatre Ă  cinq cents internes. Quatre ou cinq filles en tout (thème de rĂ©flexion : de l’homosexualitĂ© (6) comme situation Ă©ducative…). En moyenne, trente-six Ă  quarante heures de cours par semaine.

Se pose alors la question de la stratĂ©gie Ă  adopter :

1. Impossible de " faire cours " : on n’enseigne pas " la " philosophie. On peut tenter d’apprendre Ă  rĂ©flĂ©chir, mais, comme on n’apprend pas Ă  jouer du piano en Ă©coutant un virtuose (Alain), on n’apprend pas Ă  penser en Ă©coutant quelqu’un qui " pense bien ". Il y a bien sĂ»r un plaisir du " concert ", mais il ne s’agit pas d’un travail.

2. Trois heures par semaine, donc, pour travailler, en philosophie : " travailler ", qu’est-ce Ă  dire ? Le " travail " scolaire a peu de rapports avec le travail rĂ©el. Ingurgiter et rĂ©gurgiter ne constituent pas une activitĂ© de production ou de transformation. Que peut-on " produire " pendant ces trois heures ?

3. Le dĂ©sir : comment organiser la libertĂ© ? Travaux de groupes, bien sĂ»r, libertĂ© de circulation, mobilitĂ© des meubles (plĂ©onasme). Quelques règles. LibertĂ© des thèmes de rĂ©flexion. Que peut-il se passer ?

C’est la deuxième surprise. Terrain inconnu dans lequel il va falloir se repĂ©rer. Qu’est-ce qui, dans cet inconnu, pourrait se ramener Ă  du (bien) connu ? Comment ramener le prof Ă  son rĂ´le, pour pouvoir garder le sien ?

Le " prof sympa " : on a connu, on connaĂ®t. Ça ne dure guère ? Souvent, parce que devant la " dĂ©bandade " ( ? ), ça peut craquer, un prof, et alors la question est : " Il va le supporter jusqu’oĂą, qu’on ne foute rien ? Quand va-t-il remonter sur l’estrade ? Ou abandonner ? "

Le prof " dĂ©mocratique " ; on a connu aussi : " Qu’est-ce que vous voulez faire ? " Un grand silence, hĂ©las, lui rĂ©pondit (7). Ou bien : la musique, l’occultisme, la parapsychologie, Dieu, la violence, les OVNI… Et aussi : qu’est-ce que la philosophie ?, les rapports humains, l’éducation… Bien. Mais, une fois qu’on a bavardĂ© sur toutes ces questions, ensemble, ou par groupes, qu’est-ce que ça peut donner ?

Alors, pour l’instant, trois voies :

– ne pas s’impliquer : rĂ´le technique (8) ; 

– travailler soi-mĂŞme ;

– Ă©crire, et parler (ce qui ne veut pas dire bavarder ? ) (9).

Questions :

– Comment " les " amener Ă  se rendre compte de leur propre valeur ? Le premier texte qui suit " J’écris en rouge " a Ă©tĂ© rĂ©cupĂ©rĂ© in extremis, froissĂ©, par terre (10).

– Comment rĂ©pondre sans s’impliquer (s’épancher ?), sans " boucher " (11) ? Entendre sans vouloir " comprendre " (12) ?

On verra bien. Mais il y a aussi cette question posĂ©e par le contexte : le laminage continu qu’impose l’institution. Les trois heures de philo rĂŞvĂ©es comme " brèche ", " marge " ? Il y a peut-ĂŞtre lĂ  aussi un piège. Donc, pour ce qui est du " contenu ", la situation elle-mĂŞme comme objet de rĂ©flexion (13). Mais alors ! Un peu d’angoisse, Ă  rendre monnayable, utilisable (cf. Jean Oury, Cahiers n° 156).

C’est dans ce lycĂ©e qu’un Ă©lève, interne, s’est pendu, l’an dernier : la fonction habituelle d’un des quatre poteaux de baskets de la cour de rĂ©crĂ©ation s’est trouvĂ©e provisoirement dĂ©tournĂ©e.

Bernard Defrance, 5 octobre 1978.

 

 

Quelques textes d’élèves, Ă©crits en cours de philosophie, tels qu’ils ont Ă©tĂ© publiĂ©s, en brochures ronĂ©otĂ©es dans le lycĂ©e (avec " dĂ©pĂ´t lĂ©gal " au CDI) (14)

 

J’écris en rouge !

J’écris en rouge !

… parce que j’ai le droit d’écrire en rouge

et parce que vous n’avez pas le droit de me refuser le droit d’écrire en rouge

… et puis il est interdit d’interdire d’écrire en rouge

et de nous interdire le droit d’écrire en rouge :

c’est une atteinte aux libertés,

et puis,

j’ai aussi le droit d’écrire en vert !!!

Tel l’ai-je dit !

Les rois du droit.

Fantaisie collective de Jean-Marie, Didier, Patrick.

 

Qu’est-ce que je fais ici ?

Qu’est-ce que je fais ici ?

En voilĂ  une drĂ´le de question ! Je poursuis mes Ă©tudes, Ă©videmment.

Oui… d’accord, mais pourquoi ?

Pour pouvoir décrocher le diplôme qui me permettra de faire le métier qui semble me plaire actuellement. Pour ça, avant tout, il faut le bac. Et ensuite il faudra que je travaille à m’en rendre malade pendant deux ou même trois ans. Trois ans encore, plus tranquilles, certes, et j’aurai mon diplôme. Après quoi, le service militaire.

Je vais gâcher les plus belles annĂ©es de ma vie Ă  Ă©tudier. Pourquoi ?

Pour avoir un mĂ©tier qui me permettra de gagner beaucoup d’argent : " l’Argent ne fait pas le bonheur " ?… Et moi, je veux vivre heureux.

Et si je partais ?

Mais oĂą ? Et pourquoi ?

OĂą : je n’en sais rien.

Ici, ailleurs, libre.

Je voyagerais. Je rencontrerais des gens, j’apprendrais des choses, qui me seraient certainement plus utiles que les maths et la physique, qui ne servent qu’à avoir ce fameux diplôme, pour gagner des sous…

Pourquoi partir ?

Parce que c’est Ă  vingt ans qu’on peut dire merde au monde, ou tirer la langue Ă  la sociĂ©tĂ©, au monde des adultes oĂą les enfants n’ont pas leur place. Vingt ans : on est presqu’adulte Ă  vingt ans, mais pas encore… et c’est peut-ĂŞtre pour ça qu’on veut dire merde une dernière fois au monde des adultes, dans lequel on va entrer et auquel nos propres enfants diront merde.

Bon ! Je pars…

Mais que vont penser les gens, mes parents, eux qui se sont " crevĂ©s ", " saignĂ©s aux quatre veines ", comme disent mes amis, pour me pousser lĂ  oĂą je suis ?

Je ne leur ai rien demandĂ© !

… Enfin, c’est fait, trop tard.

Si je pars, les gens vont dire que je suis bête car j’avais les possibilités de réussir…

Je me fous de ce que pensent les gens !

Mais quand même, je ne peux pas partir comme ça…

Quelle idĂ©e ai-je eu de me poser cette question ! " Qu’est-ce que je fais, ici ? " Si je continue Ă  me poser des questions, je ne vais plus pouvoir bosser. Alors, mieux que j’arrĂŞte de penser ? Mieux vaut que je me remette Ă  bosser, comme ça tout le monde sera content… Sauf moi, peut-ĂŞtre, mais qui se soucie de moi ? Je suis jeune : je dois travailler pour entrer dans ce monde des adultes oĂą je n’ai pas encore ma place.

J’écris ça parce que j’aimerais que cette " page d’écriture " amène d’autres jeunes Ă  se poser les mĂŞmes questions. Peut-ĂŞtre s’en trouvera-t-il qui seront moins lâches que moi et qui partiront vraiment au lieu de faire comme moi : trouver des raisons " bidon " pour ne pas franchir le pas.

Un " Ă©lève " de terminale E (15).

 

Naître ou ne pas naître, c’est la raison d’être.

NaĂ®tre… Tout le monde naĂ®t ! Et ceux qui ne naissent pas, que sont-ils, que font-ils, oĂą sont-ils ?

Je suis nĂ©, j’aurais pu ne pas naĂ®tre… Serais-je alors molĂ©cule, bactĂ©rie, insecte, oiseau, vĂ©gĂ©tal… ou bien rien ?

Qu’est-ce que d’être rien ? Y a-t-il des " riens " sur terre ? J’aurais pu savoir, j’aurais pu ĂŞtre un " rien ", si ma crĂ©atrice avait fait une fausse couche.

J’aurais aimĂ© ĂŞtre un rien. Un rien est-il plus libre, plus heureux que moi, un " jeune homme " ? C’est le destin, je ne suis pas rien, je suis moi. Et moi je dois Ă©tudier, bien sĂ»r Ă©tudier, il faut Ă©tudier pour vivre ; et puis je peux Ă©tudier, tout le monde le dit : " Ă‰lève capable quand il le veut ". Quand il veut quoi, au fait ? Ah oui ! Etudier… c’est vrai, j’oubliais… Moi, j’ai commencĂ© Ă  Ă©tudier lĂ  oĂą Papa et Maman voulaient. Puis mon père et ma mère m’ont changĂ© d’école pour continuer Ă  Ă©tudier. Après quoi mes parents ont dĂ©mĂ©nagĂ© alors j’ai rechangĂ© de collège. Enfin mes vieux m’ont conseillĂ© (fortement conseillĂ©) de faire des Ă©tudes longues (effectivement, elles me paraissent très longues, mes Ă©tudes !) VoilĂ  ma raison d’être, ĂŞtre dans une grande famille avec un grand Papa.

Finalement, je suis parce que je suis nĂ©, mais moi j’aurais prĂ©fĂ©rĂ© ĂŞtre un rien. N’est-ce pas beau d’être un rien ? Tout bien rĂ©flĂ©chi, je suis peut-ĂŞtre rien actuellement… Mais oui, je ne suis rien qu’un Ă©lève, rien qu’un ĂŞtre victime d’être né…

Un " Ă©lève " de terminale E.

 

RĂŞver

Chaque nuit, je me meurs sur un chemin étrange, que nul ne connaît

et qui mène là-bas au cœur de mes années.

Périlleuse épopée

cent fois entreprise, au sein d’un mirage

aux teintes des visages

que j’ai aimés, haïs puis oubliés.

RĂŞveries illusoires, mais Ă´ combien bĂ©nĂ©fiques ;

parodie d’une vie

en quelques heures de nuit,

où désirs et passions se déchaînent en un tumulte dantesque et où s’écroulent les murs de la Défunte Réalité.

Vie Profonde où les mots sont réduits au silence, où l’on devient Destin, orgueil de celui qui atteint la folie.

Mais la nuit au matin s’achève,

et avec elle s’enfuient les rêves…

Dérision d’un jamais accompli

malgré tout, dans la Nuit insondable

d’une Vie sans retour, d’un Destin immuable

à l’image du Temps, dont l’Homme tente en vain de sculpter le Visage…

Pascal Jacques.

P.S. : Je ne suis point triste ! Je sais rire et m’amuser, boire et aimer. Mes joies sont aussi Ă  l’image de mes dĂ©tresses dĂ©mesurĂ©es ; je suis peut-ĂŞtre un peu trop humain, tout simplement…

 

Fait divers

Dans le cadre de l’IUT de Ville d’Avray, les élèves sont autorisés à organiser des soirées régulièrement réparties dans l’année scolaire. Ces soirées ne sont pas réservées aux élèves de l’IUT mais elles sont payantes pour toute personne extérieure désirant y participer.

Au cours de l’une de ces soirĂ©es, alors que l’ambiance Ă©tait dĂ©jĂ , comme Ă  l’habitude, bonne et amicale, une bande d’environ quinze " blousons noirs " y pĂ©nĂ©trèrent de force et sans payer, bien entendu. Leur entrĂ©e jette un froid dans la salle, mais la fĂŞte continue tandis que ces " rockers ", la banane luisante, les santiags traĂ®nantes et l’œil provoquant, roulent les mĂ©caniques Ă  travers toute la salle. Soudain des mots menaçants s’élèvent, l’un des " durs " a trouvĂ© sa proie… Mais cette attaque se limite Ă  des mots, et la bande de " loubs " dĂ©mĂ©nage le plancher.

Mais ce n’est pas terminĂ© : alors que les rires et la bonne ambiance reprenaient le dessus, ces " victimes de la sociĂ©tĂ© " reviennent. Et cette fois, ils n’ont pas les mains vides, loin de lĂ . Ils ont tous les accessoires indispensables pour combattre. Sans doute pour leur survie, pour se nourrir, comme diraient les personnes " comprĂ©hensives " !

MalgrĂ© tout, je doute fort qu’une de ces personnes, ayant assistĂ© Ă  la violence de ces rockers, puisse les " comprendre " et leur pardonner… Effectivement, ils sont entrĂ©s dans la salle et ont frappĂ© les premiers gars qui leur tombaient sous la main. C’est parti ! Ils frappent de plus en plus fort, Ă  coups de poing, de boots Ă  bouts pointus , et le reste… " C’est le pied ! " : ça commence Ă  saigner ! Mais ça ne suffit pas  : ils en prennent un au hasard (Ă©lève de l’IUT), et pas en traĂ®tre ! Ă  quinze dessus… Ils le sortent, l’allongent sur le parking, et lui ouvrent le visage Ă  coups de lames de rasoir et de couteaux… Ils se fendent la gueule, lui, il a la gueule fendue…

Thierry Garrigues.

 

Un procès

Lundi 23 avril 1979, au Palais de justice de Paris, douze militants de la FĂ©dĂ©ration Anarchiste passent en appel devant la 10ème chambre correctionnelle. Ce sont les douze inculpĂ©s du 23 mars 1979 (manifestation organisĂ©e par la CGT). Le prĂ©cĂ©dent jugement Ă©tait :

– trois mois de prison avec sursis, sans inscription au casier judiciaire, pour neuf des inculpĂ© ;

– cinq mois dont quatre avec sursis pour les trois autres.

Ils sont accusĂ©s de port d’armes par destination et au titre de la loi " anticasseurs " (article 314 du Code pĂ©nal). En arrivant devant la porte, première surprise : il y avait des barrières et… pas mal de flics ! Nous Ă©tions attendus… " Nous ", c’est-Ă -dire des jeunes et des moins jeunes, venus ici pour tĂ©moigner de notre solidaritĂ© envers les inculpĂ©s ou ayant rĂ©pondu Ă  l’appel publiĂ© dans certains journaux (Le Monde Libertaire, LibĂ©ration…); J’étais curieux aussi de voir comment se dĂ©roulait un procès : je ne fus pas déçu !

Pour entrer, et ça je ne le savais pas, il faut ĂŞtre majeur. Il m’a donc fallu prĂ©senter mes papiers. Nous fĂ»mes aussi fouillĂ©s et passĂ©s au dĂ©tecteur d’armes, ceci se passant dans l’antichambre de la salle d’audience. Mais avant, il a fallu faire la queue, et elle fut longue ! Deux Ă  trois heures ! Et ceci sous la menace des flics qui Ă©taient très nerveux et qui n’hĂ©sitaient pas Ă  nous provoquer constamment en nous lançant des " vannes ". La salle Ă©tait dĂ©jĂ  pleine et j’ai dĂ» attendre encore un quart d’heure avant que quelqu’un sorte, ce qui me donnait le droit d’entrer. Tous n’ont pas eu cette chance et ont dĂ» attendre dehors jusqu’à la fin, c’est-Ă -dire trois heures plus tard.

Deux autres surprises m’attendaient dans la salle d’audience. La première : une trentaine de flics armĂ©s dans la salle. Il n’y avait qu’une trentaine de " spectateurs ", parmi lesquels une dizaine d’avocats. Dehors il y avait encore une bonne quarantaine de personnes. Deuxième surprise : les " anarchistes " ; ce n’était pas des " bonbons " avec cuir noir, c’était des gens vĂŞtus comme tout le monde, qui auraient pu passer anonymes dans une foule. OĂą Ă©taient passĂ©es les grosses brutes, les " casseurs " aux regards mĂ©chants, tout vĂŞtus de noir ? Cela m’a surpris et a dĂ» sĂ»rement en surprendre d’autres. Je n’ai pas pu rester jusqu’au verdict : je devais rentrer Ă  Champagne…

Jean-Marc Doucet.

 

Messieurs les Professeurs

Messieurs les Professeurs, n’essayez pas de vous gonfler d’importance, soyez humains simplement. Essayez d’admettre que votre savoir n’a pas la forme d’un piédestal et qu’il peut ne pas représenter le plus important, l’indispensable, pour nous.

Ne soyez point risibles et mĂŞme si derrière vous se profile la silhouette rigide de l’administration, ne croyez pas que cela vous donne le droit de nous railler impunĂ©ment. Ne soyez point juges au lieu d’être Ă©ducateurs, bien qu’il soit plus aisĂ© d’être les premiers que les seconds. Quelle est donc cette impulsion forcenĂ©e qui vous fait vous acharner sur celui qui ne sait pas ? Admettez son ignorance ou son dĂ©sintĂ©ressement et essayez d’en comprendre la cause ; votre victoire n’en serait que plus mĂ©ritante.

Sachez que nous aussi nous possĂ©dons cette fiertĂ© qui distingue le genre humain et que vous semblez prendre plaisir Ă  piĂ©tiner ; prenez le temps de lire dans le regard de vos victimes ce que leur bouche obstinĂ©ment fermĂ©e clĂ´t Ă  tout jamais.

Ce n’est point parce que, vous, vous comprenez les subtilités des matières que vous enseignez ou que vous maniez les machines avec compétence que nous le pouvons aussi. Sachez que ce n’est point à coup de mauvaises notes, de réprimandes ou, surtout, de railleries devant la classe et sur un bulletin trimestriel que vous changerez l’élève aux résultats médiocres mais, peut-être, avec un peu de compréhension…

Peut-ĂŞtre, car nous sommes si nombreux et vous ĂŞtes si seuls !…

Pascal Jacques.

 

1. ce titre est la reprise du titre d’un livre de Pierre Belleville, chez Julliard Ă©d., qui est une enquĂŞte sur les travailleurs de l’acier en Lorraine ; cet article date du deuxième mois de travail au lycĂ©e technique La Fayette Ă  Champagne-sur-Seine (77) oĂą je venais d’être mutĂ© après six ans passĂ©s Ă  l’École normale d’instituteurs de Châteauroux ; toutes les notes sont ajoutĂ©es pour le prĂ©sent tirage (1994).

2. J’avais fait, Ă  l’époque, beaucoup de stages sur des questions très diverses, comme participant ou comme organisateur, dans le cadre de Culture & LibertĂ© : la première demi-journĂ©e du stage Ă©tait toujours occupĂ©e par des prĂ©sentations mutuelles approfondies, l’expression des attentes par rapport au thème du stage et la discussion, avec Ă©ventuelles modifications, du programme et des mĂ©thodes de travail.

3. Et surtout pas les professeurs de philosophie…

4. Époque bĂ©nie ! Ce n’est que lorsque l’enseignement de la philosophie a Ă©tĂ© Ă©tendu, quelques annĂ©es plus tard, Ă  l’ensemble des terminales techniques et professionnelles que la dissertation fut infligĂ©e Ă  tous… Excellente mesure que cette extension ! Mais la " corporation " a, en Ă©change, exigĂ© et obtenu ce moyen de chantage imparable : " Faites ce que vous voulez ! Ă€ la fin, c’est moi qui note… ". Ă€ l’époque, les terminales E n’avaient d’épreuve de philosophie qu’à l’oral du deuxième groupe d’épreuves, c’est-Ă -dire s’ils obtenaient entre 8 et 10 au premier groupe.

5. 800 en rĂ©alitĂ© : les 200 autres au lycĂ©e professionnel annexĂ©, Ă  cinq km de lĂ .

6. …institutionnelle !

7. Cette phrase est extraite d’une chanson " enfantine " : Le sire de Framboisie, cf. Cahiers PĂ©dagogiques, n° 176, septembre 1979.

8. J’ai un peu changĂ© lĂ -dessus, et dĂ©couvert progressivement qu’on pouvait " s’impliquer " – et mĂŞme assez loin ! Cf. Le plaisir d’enseigner, Quai Voltaire Ă©d., 1992, p. 73-87 ; mais aussi que mon implication peut laisser l’autre libre de se placer Ă  la distance qui lui convient, distance variable bien sĂ»r dans le temps…

9. LĂ  aussi, j’ai un peu changĂ© sur le " bavardage " : passage obligĂ©, " la causette ", pour en sortir ; on n’en sort pas toujours…

10. … Ă  cĂ´tĂ© de la poubelle : manque de prĂ©cision dans le tir.

11. … par la " langue de bois " … philosophique ! enfin… du cours de philosophie.

12. … et jouer les " psys " amateurs.

13. Ce qui expliquera cette centration progressive sur les questions du mal, de la violence, sous toutes ses formes.

14. La brochure des terminales E1 a Ă©tĂ© intitulĂ©e Le pot-au-feu ; le bâtiment externat avait Ă©tĂ©, dans la nuit du 10 au 11 novembre 1978, incendiĂ© : deux anciens Ă©lèves… Cf. " Paix et harmonie " dans Cahiers PĂ©dagogiques, n° 218/219, novembre/dĂ©cembre 1983.

15. Tous les textes publiĂ©s dans le lycĂ©e sous forme de brochures Ă©taient signĂ©s ; ce n’est que pour la publication dans les Cahiers que les auteurs des trois premiers textes ici prĂ©sentĂ©s m’avaient demandĂ© l’anonymat.


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