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Le vendredi 26 septembre 2003

Le vendredi 26 septembre 2003.

Matrix, nouveau projet de super-surveillance policière made in USA

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"Effrayant", selon un policier en charge du projet

 

Un nouveau programme américain d'interconnexion des fichiers publics et privés est en

phase de test depuis quelques mois : Matrix vise à optimiser l'échange d'informations

en matière de terrorisme et de criminalité entre les forces de l'ordre, qu'elles

soient locales ou fédérales. Qualifié d'"effrayant" par un des policiers en charge du

projet, le programme semble intéresser au plus haut point plusieurs services de police

et de renseignements qui n'ont, en temps normal, pas le droit d'agréger autant de

données.

 

En novembre 2002, on apprenait l'existence du Total Information Awareness, un projet

doté d'un budget de 245 millions de dollars sur trois ans et visant à placer tout

quidam sous surveillance. Le programme était dirigé par l'amiral John Poindexter,

personnage clef du renseignement américain, impliqué dans les scandales de l'Irangate

et l'affaire des Contras mêlant ventes d'armes illicites et trafics de drogue.

 

Mauvais polar

Scandale médiatique aidant, notamment sous la pression des ONG de défense des

libertés, Pointdexter a depuis démissionné, le projet a quant à lui subi un

lifting -il a été renommé "Terrorism Information Awareness"-, avant de voir

finalement, ce 26 septembre, son budget annulé.

 

Décidément peu regardantes envers le passé de leurs collaborateurs, les autorités

américaines ont confié à un autre personnage tout aussi peu amène le soin de créer une

nouvelle interconnexion de milliards de données personnelles concernant les citoyens

américains.

 

L'information, révélée début août par le Saint Petersburg Times, n'a vraiment commencé

à faire du bruit qu'après sa reprise par Associated Press et The Register, les 23 et

24 septembre dernier. Ils omettent cela dit un certain nombre de détails pour le moins

croustillants de cette affaire digne d'un mauvais polar.

 

Le projet, ça ne s'invente pas, a pour nom Matrix, pour Multistate Anti-Terrorism

Information Exchange. Financé par le Département de la justice américain, à

concurrence de 4 millions de dollars pour l'instant, Matrix vise à optimiser l'échange

d'informations en matière de terrorisme et de criminalité entre les forces de l'ordre,

qu'elles soient locales ou fédérales.

 

6600 agences américaines connectées

A ce jour, 13 états participent au projet pilote et échangent leurs données via un

réseau sécurisé intitulé RISS (pour Regional Information Sharing Systems). Celui-ci

vise également à échanger des informations, et coordonner les efforts des forces de

l'ordre en matière de lutte contre le trafic de drogue, le terrorisme, la

cybercriminalité, les gangs et autres organisations criminelles.

 

Pas moins de 6600 agences américaines sont connectées au Riss : du commissariat de

quartier à la Drug Enforcement Administration (DEA), en passant par les douanes, le

FBI ou les services secrets. Le projet inclue également des agences canadiennes,

australiennes, portoricaines ou encore britanniques.

 

La différence entre les informations accessibles par le Riss et celles échangées via

Matrix tient essentiellement en ce que ce dernier permet non seulement de consulter

nombre de données criminelles ou administratives (permis de conduire, fichiers des

plaques d'immatriculation, etc.), mais aussi des bases de données privées qui ne sont

normalement accessibles qu'après obtention d'un mandat.

 

L'astuce du privé

L'astuce consiste à passer par un sous-traitant, lui aussi privé, et donc habilité à

interconnecter des bases de données, ce que les autorités ne sont a priori pas

autoorisées à effectuer, en vertu du Privacy Act, la loi de protection de la vie

privée adoptée aux Etats-Unis en 1974.

 

Le Département de la Sécurité intérieure (Department of Homeland Security), créé dans

la foulée des attentats du 11 septembre pour coordonner la lutte antiterroriste,

serait prêt, selon le quotidien Washington Post, à investir 8 millions de dollars

supplémentaires pour étendre Matrix au niveau national. Une broutille en comparaison

des 3,2 milliards de dollars qu'il a confiés au Département de la Justice en 2003.

 

Matrix aurait donc de l'avenir. Phil Ramer, un des policiers en charge du projet, a

déclaré au Washington Post : "C'est effrayant. Des abus pourraient être perpétrés : je

peux tout savoir de vous et de vos voisins". Avant d'ajouter : "Notre principal

problème aujourd'hui est que tous ceux qui en entendent parler veulent l'adopter."

 

Autre problème : la personnalité-même de l'initiateur du projet Matrix, un homme

soupçonné d'être un ancien trafiquant de drogue, et d'avoir contribué au truquage de

l'élection de Georges Bush.

 

Jean-Marc Manach

"States Join in Building Terror Database" (AP):

http://story.news.yahoo.com/news?tmpl=story&u=/ap/20030924/ap_on_hi_te/terror_database

_5

 

"A back door to Poindexter's Orwellian dream" (The Register):

http://www.theregister.co.uk/content/55/33006.html

 

"U.S. Backs Florida's New Counterterrorism Database" (The Washington Post):

http://www.washingtonpost.com/ac2/wp-

dyn?pagename=article&node=&contentId=A21872-2003Aug5¬Found=true

 

TIA: le Pentagone vise le contrôle total de l'information (6711.com):

http://www.6711.com/art/01n_tias.htm

 

Matrix reloaded: son initiateur est lui-même sur-fiché par les autorités (Transfert)

http://www.transfert.net/a9346

 

House vote stymies TIA spy plan

http://news.com.com/2100-1029-5082253.html

_______________________

http://www.transfert.net/a9345 |  Tous droits réservés | © Transfert.net

 

 

Le père du projet de surveillance policière Matrix a un lourd passé

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Ex-trafiquant de drogue et impliqué dans le trucage de l'élection de Bush

 

Les autorités américaines testent depuis quelques mois encore un nouveau projet

d'interconnexion des fichiers afin de lutter contre le terrorisme et la criminalité :

"Matrix". Ce programme a été créé par Hank Asher, un multimillionnaire qui a bâti sa

fortune sur l'agrégation et la revente de données personnelles. Mais ce personnage est

soupçonné d'être un ancien trafiquant de drogue. Et il a également contribué

indirectement à l'élection contestée du président George Bush.

 

Les révélations sur le lourd passé de Hank Asher, publiées le 2 août dernier par Lucy

Morgan, journaliste au quotidien de Floride St. Petersburg Times n'ont pas fini de

faire du bruit.

 

Liste purgées

Hank Asher est devenu millionnaire en créant plusieurs sociétés de collecte de données

personnelles. La plus connue, Database Technologies (DBT) fut impliquée dans le

scandale de décompte des voix lors de l'élection de Georges W. Bush.

 

DBT avait en effet vendu un fichier truffé d'erreurs au cabinet de Jeb Bush, frère de

l'actuel président américain, et gouverneur de l'état de Floride, qui s'en était servi

pour expurger les fichiers d'électeurs de plusieurs milliers de personnes, des

Afro-Américains pour la plupart. Ces personnes avaient été rayées, à tort, des listes

électorales.

 

Lors de l'élection présidentielle, le démocrate Al Gore n'a été battu que d'une

centaine de voix, et nombreux sont ceux qui estiment que, sans le tour de passe-passe

de Jeb Bush, George Bush n'aurait probablement pas été élu président des Etats-Unis.

C'est en tout cas la thèse défendue par de nombreux journalistes américains, comme le

relate par exemple un documentaire diffusé actuellement sur la chaîne thématique

française Planète.

 

Plus-value et passe-passe

En 1999, Asher a été contraint à revendre ses parts au sein de DBT - ce qui lui a

rapporté la somme de 147 millions de dollars - après que le FBI et la Drug Enforcement

Administration (DEA) eurent interrompu leurs contrats avec cette société. Ironie de

l'histoire, c'est précisément en raison de la consultation des bases de données

policières que le père de Matrix a dû quitter sa société d'interconnexion des

fichiers.

 

Les agences fédérales venaient en effet de s'apercevoir que le contrat permettant à

1500 services policiers d'accéder aux données de DBT avait été initié par deux anciens

membres de la DEA devenus par la suite vice-présidents de DBT. Mais surtout, les

fichiers de la police décrivaient Asher comme un ancien trafiquant de drogue.

 

Pilote d'avions, Asher résidait dans les années 80 sur une petite île des Bahamas

utilisée par des trafiquants de drogue, et s'était retrouvé impliqué dans un réseau de

cocaïne qui pouvait rapporter 150 millions de dollars en une seule année, selon

l'enquête du St Petersburg Times. Les autorités lui auraient alors accordé une totale

immunité en échange de sa collaboration en tant qu'informateur et témoin dans

plusieurs procès. Ce deal lui a permis de n'être ni arrêté, ni inculpé.

 

Filtrer des milliards de données

ChoicePoint, une autre société spécialisée dans l'interconnexion de fichiers à

destination, notamment, des forces de l'ordre, racheta DBT. Elle accusa ensuite Asher

d'avoir violé une clause de son contrat de cession, en se servant de la technologie

qu'il avait déployée à DBT pour créer Seisint, une société elle aussi spécialisée dans

l'agrégation de données personnelles.

 

Sur son site, Seisint affirme être capable de "fusionner et analyser des dizaines de

milliards de données en quelques secondes ou minutes". Si sa filiale Accurint est

essentiellement tournée vers le marché privé (y compris celui des particuliers)

Seisint compte elle nombre de forces de l'ordre parmi sa clientèle.

 

En 1993, Asher commença à travailler avec l'administration en charge de la police de

Floride, le Florida Department of Law Enforcement (FDLE). Il y est devenu un ami très

proche de son patron, James T. Moore, au point que plusieurs de ses subordonnés s'en

étaient plaints auprès du gouverneur Jeb Bush, le frère de l'actuel président des

Etats-Unis.

 

"Un véritable ami"

Toujours selon la journaliste Lucy Morgan, James T. Moore a déclaré le 15 juillet

dernier, à l'occasion de la fête organisée pour son départ en retraite - où Asher

était le seul civil invité - que ce dernier "avait fait plus que quiconque pour

faciliter l'échange d'informations et de renseignements pour la police du pays". Et le

chef des polices de Floride de conclure son portrait : "C'est un patriote, un

véritable ami."

 

Suite aux attentats du 11 septembre, Asher avait proposé au FDLE de mettre en place,

gratuitement, un système permettant d'interroger aussi bien les bases de données

publiques que privées afin de mieux pouvoir lutter contre le terrorisme.

 

On trouve ainsi mention, dans un document intitulé "Legislative Priorities

2003-2004"", disponible sur le site du FDLE, d'un système nommé FCIC+. Mis en place

par Seisint, ce FCIC+ "améliore de façon significative les capacités d'analyses des

forces de l'ordre, accroît le volume des données corrélées, et fait gagner un temps

précieux" aux enquêteurs.

 

En interrogeant à la fois les données criminelles du FDLE, celles de l'institution

carcérale et "une multitude de sources publiques et privées", FCIC+ se vante de

"permettre aux utilisateurs autorisés de passer de plusieurs milliards d'entrées à

quelques centaines seulement". Donc d'affiner les résultats de leurs recherches.

 

Doté d'un budget initial de 1,6 million de dollars, le système FCI+ est, selon le

document du FDLE, consultable gratuitement pendant trois mois par 600 agents des

forces de l'ordre, avant d'être proposé, sous forme d'abonnement, à raison de 100

dollars par mois et par utilisateur.

 

Démission mais remerciements

Le 1er août dernier, le FDLE annonçait avoir conclu le contrat avec Seisint, FCIC+

ayant été entre temps renommé. Le 2, l'article du St Petersburg Times révélant le

passé d'Asher était publié. Le 3, le FDLE annonçait qu'il était prêt à envisager toute

proposition similaire à celle de Seisint, dont le contrat était suspendu le temps de

vérifier le passé d'Asher.

 

Toujours le 3 août, l'agence Associated Press interrogeait Martha Barnett, ancienne

présidente de l'association du barreau américain. L'avocate juge Asher comme un

"génie" en matière de nouvelles technologies. Tout en reconnaissant avoir entendu

parler des accusations portées à son encontre, elle estime que le plus important n'est

pas ce qu'il a pu faire dans le passé, mais les technologies qu'il propose

aujourd'hui.

 

Le 30 août, Lucy Morgan révélait qu'Asher venait de démissionner de Seisint, et que le

FDLE confirmait le contrat passé avec la société.

 

Suite à l'annonce de sa démission de Seisint, l'enquête sur le passé d'Asher aurait

été interrompue le 29 août dernier. Elle apporte apporte tout de même une dernière

touche au tableau : selon le rapport d'enquête du FDLE transmis à Jeb Bush, Asher

aurait aussi été impliqué dans un complot visant à assassiner le sandiniste Daniel

Ortegua, président élu du Nicaragua, alors en guerre contre les Contras, milices

paramilitaires financées par les Etats-Unis.

 

Réécrire le passé

Le rapport du FDLE précise que le seul autre témoin de l'affaire visant Ortegua est

depuis décédé et que, bien que cet épisode constitue "l'aspect le plus problématique"

du dossier de Asher, il "ne peut être corroboré". Autre point invérifiable rapporté

par le FDLE : en 1995, Asher aurait vendu des données policières à des trafiquants de

drogue...

 

La biographie d'Hank Asher a depuis été retirée de la page du site web de Seisint

consacrée à ses dirigeants, mais on peut encore la trouver via le site archive.org.

 

Seisint n'a cela dit pas retiré de son site web la mention des différentes

recommandations ou récompenses reçues par Seisint ou par Asher lui-même, émanant de

l'association des chefs de police de l'état de Floride, de l'Association

internationale des officiers de police, du service d'immigration, du FBI ou encore des

services secrets américains...

 

Jean-Marc Manach

Matrix, nouveau projet de super-surveillance policière made in USA (Transfert):

http://www.transfert.net/a9345

 

Les articles de Lucy Morgan (St. Petersburg Times):

http://www.sptimes.com/columns/morgan.shtml

 

"USA 2000: Chronique d'une fraude électorale", documentaire (Planete):

http://www.planete.tm.fr/detail_prog.html?id_prog=15223

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