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Namur - 24 mai 1995

Mozet - 24 mai 1995

intervention au colloque

“ DĂ©velopper la participation des jeunes â€ť

organisé par l’Institut Central des Cadres,

texte de l’enregistrement révisé par l’auteur,

notes ajoutées pour la publication,

et rĂ©ponses aux questions Ă©crites ;

Actes à l’ICC, 23A, rue Belliard, B - 1040 Bruxelles

 

 

 

 

 

Les conditions juridiques de la participation des élèves

 

par Bernard Defrance

professeur de philosophie

lycée Pierre de Coubertin, Meaux (F-77)

 

 

 

 

 

 

J

e crois que la première condition de la participation, c’est le droit de ne pas participer. C’est une question que je me pose souvent, par exemple quand je suis chargĂ© d’organiser les Ă©lections de dĂ©lĂ©guĂ©s dans l’une de mes classes : je constate qu’une Ă©norme majoritĂ© d’élèves ne veulent pas participer et ne participent pas, de fait. Est-ce qu’on a le droit Ă  l’école de ne pas participer ? [1] J’irais mĂŞme plus loin : est-ce qu’on a le droit, Ă  l’école, de ne pas s’intĂ©resser ? De poursuivre des objectifs purement personnels, individuels, dans cette sociĂ©tĂ© que constitue l’école ? Il me semble que le premier obstacle Ă  la participation, c’est prĂ©cisĂ©ment cette espèce “ d’obligation â€ť Ă  participer…

 

On a parlĂ© de l’école comme d’un lieu de vie, d’organiser des lieux de parole… mais, pour que je puisse parler dans un groupe, il faut que je puisse le faire dans une certaine sĂ©curitĂ©. Il ne faut pas que je coure le risque de passer aux yeux des camarades pour un “ fayot â€ť, il ne faut pas que je coure le risque d’être jugĂ©, par exemple sur la qualitĂ© de ma verbalisation ; si je fais des fautes, si je bafouille, comme Ă©lève, je peux me faire reprendre, couper la parole par le prof, ce qui me fait perdre le fil de ma pensĂ©e, je ne sais plus ce que je voulais dire et alors, du coup, je suis paralysĂ©.

Pour qu’il y ait participation, il faut donc qu’il y ait communication, donc possibilitĂ© de parler en sĂ©curitĂ©. Et je crois en effet qu’une des conditions de cette sĂ©curitĂ© est de l’ordre du juridique : il faut aussi se rĂ©fĂ©rer Ă  l’ordre du juridique pour clarifier les conditions de la communication et donc de la participation.

Parler en classe, pour un Ă©lève [2], c’est quelque chose d’extrĂŞmement difficile. Il y en a parmi vous qui sont Ă©lèves et ils connaissent bien la scène classique : le professeur parcourt la classe du regard pour savoir qui il va interroger, qui il va envoyer au tableau, tout le monde rentre la tĂŞte dans les Ă©paules, ou essaye d’avoir l’air le plus indiffĂ©rent possible pour ne pas se faire remarquer, et ce soulagement quand ça tombe sur le voisin… Et celui sur lequel ça tombe va au tableau, et quand on est “ au tableau â€ť, il se passe un certain nombre de choses… Par exemple, voilĂ  ce qu’écrit HervĂ© [3] : « L’annĂ©e dernière en mĂ©canique, le professeur m’avait appelĂ© au tableau pour rĂ©soudre un exercice. Bien sĂ»r, je ne savais pas la rĂ©ponse… Alors j’ai commencĂ© Ă  Ă©crire, les trois-quarts Ă©taient faux. Le professeur a commencĂ© Ă  faire des rĂ©flexions, je commençais Ă  avoir peur, Ă  transpirer, ce qui s’est accentuĂ© quand les Ă©lèves s’y sont mis, tout s’est transformĂ© en brouhaha dans ma tĂŞte, en panique… Je n’avais qu’une envie, c’était de crier merde, de prendre mes affaires et de rentrer chez moi. Je me sentais humiliĂ©, rabaissĂ© par toutes ces moqueries, et je peux vous dire qu’on trouve le temps très long dans cette situation. Mais je crois que ce sont plus les Ă©lèves qui m’ont humiliĂ© que le prof. »

Pour parler en classe, il faut pouvoir le faire dans une certaine sĂ©curitĂ©. Or, comment je peux parler, dire par exemple mes ignorances, mes reprĂ©sentations mentales fausses, si je cours le risque que celui Ă  qui je les exprime, le prof, se serve de ces “ aveux â€ť pour me juger ? Or, je ne peux pas entrer dans un processus d’apprentissage si je ne peux pas exprimer mes ignorances…

Si je vais Ă  l’école, c’est bien parce que je suis ignorant. Et je ne peux pas exprimer ces ignorances en toute sĂ©curitĂ© si je m’entends dire, comme je me le suis moi-mĂŞme entendu dire par le professeur de physique de seconde auquel je disais que je n’avais pas compris : « Mais, mon jeune ami, vous auriez dĂ» voir cela en cinquième ! Â» – dans le meilleur des cas le professeur recommençait l’explication et il s’imaginait qu’en rĂ©pĂ©tant l’explication donnĂ©e dix minutes avant, on allait mieux comprendre la deuxième fois que la première [4] ; donc j’allais voir les copains, et lĂ , entre pairs, je comprenais ce que je n’avais pas compris dans le cours, dans la situation de dĂ©nivellation hiĂ©rarchique, dans cette relation oĂą celui qui enseigne est en mĂŞme temps celui qui va juger des rĂ©sultats de cet enseignement. Comment puis-je avouer mes ignorances, mes manques [5], mes reprĂ©sentations mentales fausses, mes prĂ©jugĂ©s, dans ce cas ? Comment puis-je parler si, effectivement, ce que je dis risque de se retourner contre moi ? Philippe Perrenoud, quelque part, fait ce jeu de mots sur l’instruction publique et la fonction de juge d’instruction [6] : la première chose que j’apprends Ă  l’école c’est que “ tout ce que je dis peut se retourner contre moi â€ť, et donc comment s’étonner des rĂ©ticences Ă  “ participer â€ť ?

 

On vient de dire que la participation, la dĂ©mocratie, cela ne s’apprenait pas seulement “ Ă  la pĂ©riphĂ©rie â€ť, dans les activitĂ©s pĂ©riscolaires, les clubs, les activitĂ©s associatives ou sportives, les journaux lycĂ©ens, etc., mais que ça s’apprenait dans la classe : eh bien, ce qui caractĂ©rise le cĹ“ur de cette relation, c’est que je suis obligĂ© de faire Ă©tat de mes manques devant celui qui va me juger. Je dois ĂŞtre demandeur de savoir, je dois ĂŞtre “ motivĂ© â€ť, je suis priĂ© de m’intĂ©resser, de me passionner mĂŞme ! Mais, Ă©videmment, dans les emplois du temps fixĂ©s ! Alors, de 8h Ă  9h, c’est les enjeux de la bataille de Marignan, de 9h Ă  10h, c’est la reproduction des oursins, de 10h Ă  11h, c’est les techniques du grimper de corde, de 11h Ă  12h, c’est le thĂ©orème de Pythagore. Ceci, bien entendu, avec un professeur qui ne voit pas qu’on mange du chewing-gum, et un deuxième qui me flanque deux heures de colle, parce que j’avais oubliĂ© de jeter le chewing-gum : j’avais oubliĂ© que la loi changeait quand je changeais de salle. Il y a donc lĂ  quelque chose qui est absolument capital si on veut rĂ©flĂ©chir Ă  ce qu’est la participation Ă  l’école : elle suppose que je sois placĂ© dans une situation pas seulement pĂ©dagogique, pas seulement psychologique, dans les relations entre professeurs et Ă©lèves, mais dans une situation juridique, dans laquelle m’est reconnu le droit de ne pas m’intĂ©resser du moment que, bien entendu, mon comportement n’empĂŞche pas les autres de s’intĂ©resser.

 

Ă€ partir du moment oĂą m’est reconnu le droit de ne pas participer, alors je peux participer en effet. Si, dans la classe, les fonctions que l’on considère comme devant ĂŞtre distinctes dans une dĂ©mocratie, les fonctions lĂ©gislatives, exĂ©cutives et judiciaires, si ces fonctions sont distinctes, alors en effet je suis protĂ©gĂ© par un ensemble de procĂ©dures structurĂ©es, un ensemble de dispositifs qui rendent impossible, en effet, la confusion des pouvoirs telle qu’elle est actuellement vĂ©cue, Ă  savoir que ce sont les mĂŞmes qui enseignent et qui jugent le rĂ©sultat de cet enseignement. Et on comprend bien alors pourquoi nous passons notre temps, comme enseignants, Ă  culpabiliser, puisqu’en jugeant nos propres Ă©lèves, nous nous jugeons nous-mĂŞmes, et que, dans un certain nombre d’endroits, les rĂ©sultats sont parfois un peu dĂ©primants [7] ! Alors, effectivement, cela ne facilite pas la communication Ă  l’intĂ©rieur de la classe.

Pour ĂŞtre le plus bref possible, et je suis bien sĂ»r un peu caricatural dans ces quelques mots, je dois dire que, si on parle de participation, d’apprentissage de la dĂ©mocratie, et si on ne remet pas en question cette confusion des pouvoirs dans l’ordinaire du dĂ©roulement pĂ©dagogique de la classe, toutes les bonnes volontĂ©s, toutes les qualitĂ©s psychologiques que peut dĂ©ployer le professeur ne peuvent apparaĂ®tre que comme des moyens “ d’enrober la pilule â€ť.

 

Pourquoi tant d’élèves, disais-je en introduction, ne participent-ils pas ? Nous avons des tas de textes officiels qui ont Ă©tĂ© publiĂ©s rĂ©cemment en France sur la participation des Ă©lèves, le droit d’expression des lycĂ©ens, la “ Maison des lycĂ©ens â€ť, les journaux, etc. Il n’y a pas 1% des lycĂ©ens qui se saisissent de ces pouvoirs qui leur sont reconnus par la loi. Eh bien, je crois qu’ils ne s’en saisissent pas parce qu’ils ont appris que, Ă  l'Ă©cole, selon la formule de Perrenoud, tout ce qu’ils pouvaient dire risquaient de se retourner contre eux. Peut-ĂŞtre, dans certaines situations, s’agit-il d’un risque imaginaire, mais j’ai des Ă©lèves qui ont dix-huit ans, et donc quinze ans de scolaritĂ© derrière eux, et ce n’est pas par un coup de baguette magique qu’ils vont apprendre, y compris dans mon cours, la libertĂ© de parler. Les Ă©lèves ont appris Ă  ne pas courir de risques inutiles, et il ne suffit peut-ĂŞtre pas, lĂ  aussi, de dĂ©gager dans l’emploi du temps des moments de paroles oĂą on va pouvoir dire ce qu’on pense, oĂą on va pouvoir dire toutes sortes de choses en totale libertĂ©.

Parce qu’encore faut-il que cette parole dĂ©bouche sur des dĂ©cisions, qu’elle constitue en elle-mĂŞme dĂ©jĂ  un pouvoir. Pourquoi parler si ça ne change rien ? S’il y a des lieux de catharsis, de dĂ©foulement, des petites bulles – comme c’est souvent la fonction de mon cours de philosophie dans le lycĂ©e oĂą je travaille ! – oĂą on va s’exprimer librement mais que ça ne change rien Ă  la rĂ©alitĂ© des jugements qui sont portĂ©s sur les bulletins scolaires, sur les livrets, aux dĂ©cisions d’attribution des diplĂ´mes, cette parole-lĂ  devient quoi ? Très souvent on s’apercevra que c’est une parole vide, un leurre : dĂ©foulez-vous, et maintenant que vous vous ĂŞtes dĂ©foulĂ©s, passons aux choses sĂ©rieuses ! C’est moi qui remplis les bulletins. 

Il y a trois lycĂ©es dans la ville oĂą j’enseigne, Ă  Meaux :

1. le vieux lycĂ©e classique au centre ville ;

2. celui oĂą je suis qui est le lycĂ©e “ chemin de grue â€ť [8], HLM pĂ©dagogique, construit il y a trente ans, qui est en train de s’écrouler d’ailleurs…

et 3., le lycĂ©e hyper-moderne, troisième gĂ©nĂ©ration, baies vitrĂ©es, espaces de circulation, cafĂ©tĂ©ria, transparence, informatique, ateliers, rĂ©seaux, on va se brancher sur Internet, etc.

C’est dans ce troisième lycĂ©e que le conseil d’administration a dĂ©cidĂ©, Ă  la majoritĂ© dĂ©mocratique, d’interdire aux lycĂ©ennes le port de la minijupe, et aux lycĂ©ens le port de jeans dĂ©chirĂ©s et de la casquette. Je ne suis pas professeur dans ce lycĂ©e, et quelque part je le regrette, parce que le lendemain du jour oĂą cette dĂ©cision est votĂ©e [9], bien entendu je me prĂ©sente au lycĂ©e avec un jean dĂ©chirĂ© ou une casquette sur la tĂŞte, et on voit ce qui se passe. Bien entendu, il ne se passe rien, il ne peut rien se passer ! Je suis titulaire, au dernier Ă©chelon, il y a vingt-sept ans que j’enseigne : qu’est-ce que vous voulez qu’il se passe ? Et Ă  partir de lĂ  en effet, en cours de philosophie, nous pourrions rĂ©flĂ©chir Ă  ce qu’est la loi et Ă  ce que c’est que la dĂ©mocratie.

 

Ceux d’entre vous qui Ă©taient au forum ÉCOLO Ă  Liège en mars dernier ont dĂ©jĂ  entendu ce texte, mais, je le redonne aujourd’hui pour les autres, en conclusion, et pour compliquer un peu notre rĂ©flexion : « En CM2, lorsque j’étais enfant, la classe Ă©tait partagĂ©e entre plusieurs groupes. Un Ă©lève, exclu par ces groupes, qui Ă©tait un peu rachitique et issu d’une famille pauvre, ses deux parents Ă©tant au chĂ´mage, se retrouvait souvent seul. Il Ă©tait donc notre victime favorite, les moqueries et les blagues cuisantes l’assaillaient. La masse d’élèves m’attirait, l’engrenage me “ forçait â€ť Ă  rĂ©agir comme les autres. Â» SĂ©bastien met forçait entre guillemets, ce qui veut dire que, des annĂ©es plus tard, il se demande s’il n’aurait pas pu essayer Ă©ventuellement de… Bon, il culpabilise lĂ -dessus bien sĂ»r. « Sa scolaritĂ© devait ĂŞtre un enfer. Il y a deux ans, j’ai appris qu’il Ă©tait dĂ©cĂ©dĂ© au cours d’une crise d’asthme. Après cet Ă©vĂ©nement, j’ai longtemps regrettĂ© d’avoir fait partie de cette majoritĂ© : “ la majoritĂ© a toujours tort â€ť. Â» [10]. Bien entendu, la “ majoritĂ© â€ť dont parle SĂ©bastien ici, ce n’est pas la majoritĂ© dĂ©mocratique, c’est la masse des Ă©lèves coagulĂ©s dans la persĂ©cution et la victimisation de l’un d’entre eux, le plus faible, l’exclu. Cette coagulation contre la victime Ă©missaire, la “ tĂŞte de turc â€ť, existe dans toutes les classes, dans toutes les salles de profs, vous savez, le prof chahutĂ© dont ne personne ne parle, bien entendu… Cette coagulation, c’est justement ce qui permet au groupe de tenir.

 

Et donc, pour conclure, une alerte et deux propositions.

 

Une alerte d’abord : quand ça “ tourne rond â€ť dans vos Ă©tablissements, dans vos classes, quand les choses marchent bien, quand tout le monde participe !, quand il y a une bonne ambiance, demandez-vous qui paye. Cherchez et très souvent vous trouverez, vous dĂ©couvrirez peut-ĂŞtre, comme je l’ai dĂ©couvert dans mes propres classes, que le marginal, il n’est pas en marge du tout ! L’exclu n’est pas exclu, il est au centre, il est au point d’équilibre invisible, qui permet au groupe de “ tourner rond â€ť dans le silence de la violence propre Ă  ce fonctionnement institutionnel dans lequel se fabriquent nos Ă©lites, rĂ©publicaines chez nous, je ne sais pas comment il faut les appeler chez vous…

 

Première proposition : que dans les Ă©tablissements scolaires, une commission de discipline soit seule autorisĂ©e Ă  prononcer les punitions et rĂ©parations en cas d’infraction aux règles. Qu’on introduise ce principe simple que le magistrat ne juge pas son propre cambrioleur et qu’un professeur ne peut pas punir lui-mĂŞme un Ă©lève qui lui aurait portĂ© tort et que l’élève, rĂ©ciproquement, ne peut pas casser la figure au professeur qui l’aurait injuriĂ© devant la classe. Il y a une instance de mĂ©diation, cette instance doit avoir un fondement juridique, ne peuvent juger des infractions au règlement que ceux qui ne sont pas impliquĂ©s dans l’affaire [11]. Toute une sĂ©rie de modalitĂ©s peuvent ĂŞtre inventĂ©es localement, je vous livre cette idĂ©e et vous faites comme vous voulez, comme vous pouvez.

 

Deuxième proposition : dans l’évaluation des savoirs et la validation des diplĂ´mes, qu’effectivement, cette validation, qui va se traduire, se monnayer sur le marchĂ© du travail, soit confĂ©rĂ©e par d’autres que les enseignants qui ont eu les Ă©lèves [12].

 

Ces deux modifications institutionnelles me paraissent les conditions juridiques indispensables pour que, en effet, peut-être, la participation des élèves commence à prendre un sens. Je vous remercie.

 

 

RĂ©ponses aux questions

 

Le temps imparti aux dĂ©bats n’ayant pas permis qu’il puisse ĂŞtre rĂ©pondu Ă  toutes les questions de l’assemblĂ©e, on trouvera ci-après quelques esquisses de rĂ©ponses Ă©crites après-coup. Mais chacune de ces questions mĂ©riterait une nouvelle confĂ©rence ! Et je resterai donc ici très sommaire, en gardant le style oral…

 

1. Enseigner l’injustice, l’humiliation, l’oppression peut-il se concevoir comme une formation Ă  la citoyennetĂ© ? Comprendre deux faces d’une mĂ©daille pour renforcer l’apprentissage de la participation ?

 

Le verbe “ enseigner â€ť utilisĂ© dans la question est ambigu : s’agit-il d’informer sur les injustices et oppressions existant dans le monde ? Oui, bien sĂ»r, il faut le faire. Dans de nombreux Ă©tablissements scolaires, chez nous, existent ce qu’on appelle des “ clubs des Droits de l’Homme â€ť qui diffusent des informations et promeuvent des actions de solidaritĂ© sur le modèle de celles, par exemple, d’Amnesty International. Mais si vous vous demandez si l’expĂ©rience personnelle, par le jeune lui-mĂŞme, de l’humiliation, de l’injustice, voire de l’oppression peut ĂŞtre formatrice de la citoyennetĂ©, alors j’aurais tendance Ă  rĂ©pondre non, certainement pas. Chacun d’entre nous a vĂ©cu des expĂ©riences d’injustices, parfois d’humiliations, plus rarement d’oppression, et nous savons bien que nous nous serions bien passĂ©s de ces expĂ©riences… Il est vrai cependant que l’expĂ©rience de l’injustice peut inciter aux prises de  consciences, “ forger â€ť, comme on dit, le caractère, inciter Ă  orienter sa vie vers la lutte contre ces injustices, mais nous savons aussi que, plus souvent, le dĂ©sir simple de “ revanche â€ť peut prendre le dessus, ou pire, la rĂ©signation, la soumission aux “ fatalitĂ©s â€ť. C’est prĂ©cisĂ©ment l’enjeu de l’éducation aujourd’hui, de permettre la construction de la citoyennetĂ© chez tous les jeunes et pas seulement chez ceux qui auraient subi des injustices. En rĂ©alitĂ©, il nous est impossible d’éliminer la violence : nous ne pouvons que permettre aux jeunes de construire les procĂ©dures qui permettront aux violences d’être justement sanctionnĂ©es et aux injustices d’être rĂ©parĂ©es. Il s’agit donc de construire le droit, de faire la loi ensemble. La question est donc moins de savoir si on peut Ă©viter aux jeunes l’expĂ©rience de l’injustice que de leur permettre de construire les moyens – les voies du droit – de la rĂ©parer, et aussi de se reconstruire eux-mĂŞmes après cette expĂ©rience. Parce que la grande difficultĂ© est que, très souvent, celui qui subit l’injustice, l’humiliation, se croit, d’une certaine manière, coupable de ce qui lui arrive : c’est un phĂ©nomène psychique extrĂŞmement complexe, que connaissent bien ceux qui soignent les gens qui ont Ă©tĂ© torturĂ©s par exemple, ou ceux qui essaient d’aider des femmes violĂ©es. Et donc, pour que l’expĂ©rience de l’injustice puisse devenir formatrice, il faut que ce sentiment de culpabilitĂ© chez la victime soit dĂ©passĂ©, et que, d’autre part, quand il l’est, trouver les moyens de la rĂ©paration sans avoir recours Ă  la vengeance. Construire le droit, l’obligation du recours Ă  la mĂ©diation pour rĂ©gler les conflits et litiges et rĂ©parer les atteintes Ă  la libertĂ© d’autrui, suppose que nous dĂ©cidions de nous interdire la vengeance. Nous avons dĂ©cidĂ©, dans nos sociĂ©tĂ©s, de nous interdire la vengeance, et les enfants ont Ă  reconstruire cet interdit, surtout, prĂ©cisĂ©ment dans les cas d’injustices ou de violences. C’est cela l’éducation civique, et mĂŞme l’éducation, tout court ! Et donc l’apprentissage de la participation ne peut commencer qu’à partir de cette dĂ©cision nĂ©gative première. Donc je ne crois pas du tout qu’il faille faire subir des injustices aux jeunes pour qu’ils prennent conscience de la nĂ©cessitĂ© de lutter contre les injustices ou les violences ! En revanche, quand ils en ont subi, et peut-ĂŞtre plus difficile encore, quand ils en ont commis, il importe de leur permettre de rĂ©parer et se rĂ©parer.

 

2. Lorsqu’on aborde le “ jugement â€ť de la matière : une idĂ©e fait son chemin de permettre aux Ă©lèves de juger, d’évaluer, sur la base de critères, les professeurs. Qu’en penser ? Il s’agit d’évaluer la manière de prĂ©senter la matière, d’obtenir des rĂ©sultats, le contact dans la transmission du savoir.

 

La question de l’évaluation emplit des bibliothèques entières ! Je ne vais pas y rĂ©pondre en deux minutes… Deux indications cependant. Premièrement : de toute façon, les Ă©lèves jugent dĂ©jĂ  les professeurs ! Je me souviens très bien de la manière dont je parlais avec mes camarades, lorsque j’étais Ă©lève, des professeurs : nous nous transmettions tous les renseignements nĂ©cessaires sur leurs manies, leurs faiblesses, leurs supposĂ©es compĂ©tences ou incompĂ©tences ! Les redoublants sont ici très prĂ©cieux… Mais, bien sĂ»r, cela se passait dans la cour de rĂ©crĂ©ation, clandestinement, plus rarement en famille (les parents aussi jugent les enseignants et les “ rumeurs â€ť vont vite…). Les quelques enquĂŞtes qui ont eu lieu sur cette question montrent que les Ă©lèves sont gĂ©nĂ©ralement très lucides sur les capacitĂ©s pĂ©dagogiques de leurs professeurs, et donc la question serait de savoir comment introduire la rĂ©ciprocitĂ© dans l’évaluation, Ă  quelles conditions ces jugements clandestins et spontanĂ©s pourraient en quelque sorte s’officialiser et ĂŞtre utilisĂ©s positivement. Et la condition essentielle me paraĂ®t ĂŞtre, deuxièmement, la distinction la plus claire possible, et mĂŞme la sĂ©paration nette de l’évaluation proprement dite et de la validation des compĂ©tences. L’évaluation est un processus permanent, interne Ă  la classe et Ă  l’équipe pĂ©dagogique qui a la responsabilitĂ© des Ă©lèves : elle permet l’ajustement permanent des mĂ©thodes (mĂ©thodes de travail chez les Ă©lèves, mĂ©thodes pĂ©dagogiques chez les professeurs), la rĂ©vision des objectifs, le règlement des litiges et des conflits, et ce qui se passe dans cette Ă©valuation ne doit pas “ sortir â€ť de la classe, et ne doit pas non plus se dĂ©rouler en prĂ©sence de quelqu’un qui aurait pouvoir hiĂ©rarchique de jugement sur les professeurs, de mĂŞme que les professeurs ne devraient pas avoir pouvoir hiĂ©rarchique de jugement sur leurs propres Ă©lèves. C’est la condition essentielle pour que les Ă©valuations soient rĂ©ellement formatives, comme on dit. Quant Ă  la validation externe (apprĂ©ciations et notes sur les bulletins, dĂ©livrance des diplĂ´mes), elle doit ĂŞtre confĂ©rĂ©e par d’autres que les Ă©ducateurs des jeunes eux-mĂŞmes, qui ne les connaissent pas, et qui ne jugent qu’en fonction des compĂ©tences (par exemple professionnelles mais pas seulement, civiques aussi…) que la sociĂ©tĂ© est en droit d’attendre du titulaire de tel ou tel diplĂ´me. Je tiens absolument, quand je prends l’avion par exemple, Ă  ce que le pilote ait obtenu sa qualification dans des conditions incontestables et pas par “ favoritisme â€ť ! De mĂŞme quand je vais chez le mĂ©decin… Donc l’idĂ©e que vous prĂ©sentez n’est possible que si l’on distingue clairement l’évaluation interne et la validation externe, et, aussi bien l’évaluation des Ă©lèves par les professeurs que l’évaluation des professeurs par les Ă©lèves, cette Ă©valuation rĂ©ciproque ne peut prendre son sens qu’en dehors de toute possibilitĂ© de pression (j’allais dire de “ chantage â€ť !) hiĂ©rarchique, des deux cĂ´tĂ©s. Il faudrait maintenant entrer dans l’analyse des difficultĂ©s que soulève cette Ă©valuation interne : quand il y a divergence, litige, voire conflit, c’est toujours “  la faute Ă  l’autre â€ť, bien sĂ»r ! D’autant que les Ă©lèves, justement parce qu’ils sont Ă©lèves, donc en position lĂ©gitime d’ignorance, ne savent pas forcĂ©ment formuler leurs critiques de manière très “ diplomatiques â€ť.   Et qu’ils sont, encore une fois lĂ©gitimement, embarrassĂ©s si on leur demande de formuler des propositions. Ils ont un passĂ© scolaire et une histoire familiale qui ne les ont pas forcĂ©ment entraĂ®nĂ©s Ă  parler, au lieu de “ s’écraser â€ť ou de vocifĂ©rer... La participation Ă , la conduite de, cette Ă©valuation interne (ce “ conseil â€ť, au sens de la pĂ©dagogie institutionnelle) nĂ©cessitent elles-mĂŞmes un apprentissage. Le dĂ©tour par l’écriture peut ĂŞtre ici très prĂ©cieux, dès lors que les interdits (de l’injure, de la diffamation) sont clairs. Écritures individuelles, mieux encore collectives. Si les Ă©lèves se mettent Ă  “ rĂ©criminer â€ť contre tel ou tel professeur, on peut les inciter Ă  exprimer collectivement leurs critiques et leurs propositions, dans un dispositif qui prĂ©voit aussi une rĂ©ponse collective de l’équipe pĂ©dagogique. Ce sont des dispositifs qui ont dĂ©jĂ  Ă©tĂ© expĂ©rimentĂ©s avec succès.

 

3. Comment un professeur peut-il mettre des points diffĂ©rents Ă  un mĂŞme devoir, Ă  une mĂŞme personne, Ă  des moments diffĂ©rents ?

 

Ça arrive souvent ! Depuis les cĂ©lèbres expĂ©riences d’Henri PiĂ©ron (voyez son livre La Docimologie, aux Ă©ditions PUF) dans les annĂ©es 1930, on sait que la notation chiffrĂ©e est très alĂ©atoire, non seulement d’un professeur Ă  l’autre pour le mĂŞme devoir, mais aussi, comme vous le rappelez, pour le mĂŞme professeur et le mĂŞme devoir, Ă  quelque temps d’intervalle. Un nombre très important de facteurs intervient ici : la situation de la copie par rapport aux autres, les diffĂ©rents critères de correction, la prĂ©sentation, la connaissance mĂŞme de l’élève… On a mĂŞme constatĂ©, avec des enquĂŞtes portant sur de très grands nombres d’étudiants aux États-Unis, que l’aspect physique des Ă©tudiant(e)s jouait sur la moyenne des notes attribuĂ©es et qu’il valait mieux ĂŞtre beau (belle !) et idiot que moche et intelligent(e) ! Mais encore une fois, il s’agit ici de la question de la justesse des notes et non de la question de la justice de ces mĂŞmes notes. On a pris l’habitude de poser la question de l’évaluation en termes d’objectivitĂ© et de subjectivitĂ© du correcteur : cette question est Ă©videmment très importante bien sĂ»r, mais on peut aussi trouver des quantitĂ©s de dispositifs de contrĂ´le permettant sinon d’atteindre, du moins d’approcher cette objectivitĂ©. Et cela ne rĂ©sout pas du tout la question de savoir qui a le droit de noter, au sens juridique de l’expression. Et donc, je maintiens que si c’est celui qui a enseignĂ© qui juge des rĂ©sultats de cet enseignement, alors la recherche de la vĂ©ritĂ©, dans l’acquisition des savoirs, se trouve remplacĂ©e par la recherche de la conformitĂ© : l’élève cherchera alors Ă  deviner ce que le professeur attend de lui – ce qu’il croit que le professeur attend de lui – pour avoir une bonne moyenne et passer dans la classe supĂ©rieure. Alors il est vrai que le caractère alĂ©atoire de la notation renforce encore l’injustice provoquĂ©e inĂ©vitablement par cette confusion constante, dans le quotidien de la classe, entre les situations d’apprentissage et les situations de contrĂ´le des rĂ©sultats de ces apprentissages, confusion entre les moments oĂą l’élève a droit Ă  l’erreur, Ă  l’ignorance et son expression, et les moments oĂą il doit faire preuve de ses compĂ©tences. Il nous faut donc, pas seulement rationaliser l’évaluation, il nous faut aussi faire en sorte qu’elle respecte le principe Ă©lĂ©mentaire et indiscutable selon lequel nul ne peut ĂŞtre juge et partie. La question de l’objectivitĂ© de la note me paraĂ®t, certes, très importante, mais tout de mĂŞme secondaire par rapport Ă  celle de ses conditions juridiques d’attribution, du moins quand cette note intervient dans le destin scolaire, et donc social, de l’élève.

 

4. PlutĂ´t que (ou en prĂ©ambule Ă ) le passage Ă  la participation, ne serait-il pas indiquĂ© de consacrer du temps Ă  aider les Ă©tudiants (et le prof) Ă  formuler leurs dĂ©sirs, leurs craintes – bref Ă  ĂŞtre, Ă  se comprendre, Ă  se tolĂ©rer ? Il y a trop peu de place pour ce type d’expression Ă  l’école, qui devance selon moi la participation (l’obligation Ă  participer).

 

Oui, bien sĂ»r : la rĂ©ponse est dans la question ! Dans les classes qui fonctionnent selon les principes de la pĂ©dagogie institutionnelle, toute une sĂ©rie de dispositifs facilitent la communication : depuis le “ quoi de neuf ? â€ť du matin, en passant par l’obligation aux Ă©changes qu’impliquent le travail scolaire proprement dit et l’organisation concrète des ateliers divers, la composition des groupes, la rĂ©partition et le contrĂ´le des responsabilitĂ©s dans les Ă©quipes, jusqu’au “ conseil â€ť, dont la première fonction est, en quelque sorte, de pouvoir “ vider son sac â€ť, et qui est le lieu d’élaboration de la loi. Toute cette organisation de la classe, très complexe, suppose aussi que les enseignants qui se lancent dans ces techniques pĂ©dagogiques se donnent les moyens de supporter les exigences qu’elles comportent, et qu’ils puissent, entre pairs, Ă©changer, analyser les problèmes qu’ils rencontrent et qu’ils ne soient pas laissĂ©s seuls dans leur recherche et tâtonnements. Ă€ l’échelle d’un Ă©tablissement, cela suppose que soient explicitement prĂ©vus dans les emplois du temps et de l’espace, ces moments et lieux ritualisĂ©s de parole et de dĂ©cisions collectives. Vous avez raison de dire qu’en effet la “ simple â€ť parole rĂ©ciproque – et cela renvoie donc Ă  ce que je disais sur la possibilitĂ© de parler en sĂ©curitĂ© – prĂ©cède la participation proprement dite.

 

5. Votre position tient en partie Ă  votre discipline, la philosophie. Comment en envisager la transfĂ©rabilitĂ© Ă  tous les cours, Ă  n’importe quel cours ?

 

Vous avez raison de dire que c’est, d’une certaine manière, parce que tout ce dont les Ă©lèves peuvent ĂŞtre amenĂ©s Ă  parler dans mon cours peut ĂŞtre rattachĂ© aux notions qui composent le programme de philosophie que je peux obtenir qu’ils s’expriment et racontent librement. Mais c’est aussi parce que je neutralise, dĂ©libĂ©rĂ©ment – je le leur explique dès les premières heures de cours –, la notation, plus exactement les notes et apprĂ©ciations portĂ©es sur les bulletins et le livret scolaire, qu’ils peuvent alors courir le risque de parler, y compris devant leurs camarades, dont, assez souvent, ils craignent plus le jugement que celui du professeur… Je peux simplement dire, en ce qui concerne la “ transfĂ©rabilitĂ©  â€ť, que j’ai moi-mĂŞme “ transfĂ©rĂ© â€ť !, après avoir travaillĂ© longtemps dans des classes primaires avec des instituteurs qui pratiquaient les techniques Freinet, la pĂ©dagogie institutionnelle. Mais, bien sĂ»r, les rĂ©sultats sont plus difficiles Ă  obtenir dans mes classes terminales, puisque je n’ai les Ă©lèves que deux heures par semaine au lieu de six heures par jour, et que, surtout, ils ont quinze ans de scolaritĂ© derrière eux ! Cela dit, je crois que, d’une part, l’obligation d’avoir recours Ă  une instance tierce pour rĂ©gler les litiges et conflits, et d’autre part, l’obligation de validation des rĂ©sultats par d’autres professeurs que ceux des Ă©lèves, ces deux changements institutionnels peuvent ĂŞtre mis en Ĺ“uvre dans toutes les disciplines et Ă  tous les Ă©chelons de la scolaritĂ©. Il est mĂŞme probable d’ailleurs qu’ils ne peuvent porter tous leurs fruits quant Ă  la socialisation des Ă©lèves que dans la mesure oĂą ils sont gĂ©nĂ©ralisĂ©s. J’ai souvent l’impression, du point de vue de l’apprentissage du “ vivre ensemble â€ť, dans mes cours de philo, de faire un travail qui aurait dĂ» ĂŞtre fait bien avant… Et en mĂŞme temps, mĂŞme limitĂ© Ă  deux heures hebdomadaires, je crois que ce travail n’est pas inutile, et je suis souvent assez Ă©merveillĂ© des capacitĂ©s de rĂ©sistance manifestĂ©es par mes Ă©lèves : il m’arrive parfois d’apprendre ce qu’ils subissent dans leurs familles et environnement et ce qu’ils ont subi et intĂ©riorisĂ© dans leurs parcours scolaires antĂ©rieurs, notamment du point de vue des orientations, et, en effet, je m’étonne souvent de ce qu’ils ne soient pas plus “ abĂ®mĂ©s â€ť qu’ils ne le sont… Quand ils peuvent prendre conscience que les “ fatalitĂ©s â€ť peuvent peut-ĂŞtre se dĂ©passer, quand ils peuvent commencer Ă  exprimer leurs frustrations, voire leurs colères, leurs tentations de violence et parfois de suicide, quand ils racontent ce qu’ils n’avaient jamais racontĂ© Ă  qui que ce soit jusque lĂ , et surtout pas Ă  leurs parents, leurs professeurs et mĂŞme les copains, alors je crois, oui, que la philosophie prend tout son sens, puisqu’ils peuvent alors dĂ©couvrir que leurs questions les plus intimes, personnelles, sont des questions universelles qu’ils peuvent partager avec les autres.



[1] Ne pas oublier que, pour les Ă©lèves, l’école est un lieu de passage : ne pas s’étonner alors que leurs investissements dans l’institution puissent diminuer avec l’âge, au fur et Ă  mesure que se profilent les nĂ©cessitĂ©s d’en sortir et d’entrer dans la vie.

[2] Je ne parle pas ici du “ bavardage â€ť !

[3] Hervé Klékot, classe terminale technique industrielle, 1994.

[4] « Les professeurs de sciences imaginent que l’esprit commence comme une leçon, qu’on peut toujours refaire une culture nonchalante en redoublant une classe, qu’on peut faire comprendre une dĂ©monstration en la rĂ©pĂ©tant point pour point Â»â€¦ Gaston Bachelard, La formation de l’esprit scientifique, Vrin Ă©d., p. 19.

[5] Pour entrer en apprentissage ou en formation, il faut se reconnaĂ®tre d’abord en manque : ce qui explique sans doute pour une part les difficultĂ©s de la formation continue des professeurs, puisqu’un professeur se perçoit lui-mĂŞme, plus ou moins consciemment, comme “ savant â€ť, grâce aux diplĂ´mes acquis…

[6] « Tout ce que tu diras pourra ĂŞtre retenu contre toi : c’est une des choses qu’on apprend Ă  l’école. Lorsqu’on dit qu’un juge instruit une affaire, on fait comme si dans cette acception le terme n’avait aucun rapport avec l’instruction publique. Et si le maĂ®tre Ă©tait, Ă  sa manière, un juge d’instruction Â», Philippe Perrenoud, MĂ©tier d’élève et sens du travail scolaire, ESF Ă©d., 1994, p. 151.

[7] En tout cas pas tout Ă  fait Ă  la hauteur des efforts, parfois considĂ©rables, dĂ©ployĂ©s par le professeur ! Les Ă©lèves sont souvent ingrats…

[8] Pour Ă©conomiser, on empile les Ă©lĂ©ments de construction le long des rails sur lesquels se dĂ©place la grue, ce qui explique ces nombreuses “ barres â€ť et “ tours â€ť, silos Ă  main d’œuvre, boĂ®tes “ pĂ©dagogiques â€ť empilĂ©es, gĂ©nĂ©ralement construits par d’anciens bons Ă©lèves diplĂ´mĂ©s…

[9] Plus encore Ă©videmment si des lycĂ©ens se font sanctionner Ă  cause de ce point de règlement !

[10] SĂ©bastien Plura, terminale technique industrielle, 1994.

[11] Nul ne peut se faire justice Ă  lui-mĂŞme.

[12] Nul ne peut ĂŞtre juge et partie.


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